Bruit

Bruit. Tel est le titre du livre silencieux qu’Hugo Bonamin présente au public. Silencieux ? L’ouvrage ne  l’est peut-être pas tant que ça : chaque page fait résonner en nous un réseau de sensations liées à la  couleur. En effet, l’artiste s’applique sur 508 pages à un archivage méthodique du cercle chromatique.  Au pastel gras, il crée feuille après feuille, un rectangle d’une unité de couleur. Néanmoins, on se prend  à douter : est-ce vraiment du vert, du mauve, du bleu que nous voyons ? Plus nous nous concentrons  et plus nous nous rendons compte progressivement qu’une couleur placée en dessous de la première  couche visible de pastel brouille notre perception. Cette couleur sous-jacente sème le doute dans  notre esprit et neutralise la pureté de la couleur. Quelque chose surgit et nous met mal à l’aise, brouille  notre certitude. Cette sensation peut être rapprochée de « l’étranger dans la maison », de l’inquiétante étrangeté freudienne.

Nous sommes confrontés à une expérience picturale dans toute sa simplicité, mais qui relève pourtant  d’un processus complexe. Au fur et à mesure que nous tournons les pages, lentement ou rapidement  au gré de notre humeur, les couleurs se mélangent dans notre cerveau, composant finalement un vaste  tableau abstrait.

Le livre a été présenté avec une installation vidéo de Roger Fähndrich et une composition sonore de Seijiro Murayama. Sur l’écran sont diffusées aléatoirement les 508 couleurs ambiguës d’Hugo Bonamin tandis que 508 sons différents sont successivement joués.